Á ce moment-là j'ai eu envie de tout, sauf de bienveillance

Ma vie de maman

L’année dernière j’ai suivi un stage sur l’éducation bienveillante.
Je voyais que je commençais à avoir du mal à  »gérer » deux enfants – Noam avait 4 ans et Eliana 1 ans- et j’avais besoin que l’on me remette un peu les pendules à l’heure, d’entendre à nouveaux tout ce que j’avais déjà lu dans les nombreux livres sur l’éducation accumulés depuis plusieurs années.
J’avais besoin de soutien, que l’on m’aide à appliquer ce que je savaisת mais que j’avais parfois du mal à mettre en pratique.
Ce stage m’a fait beaucoup de bien et m’a redonné des forces.
Et puis il s’est terminé et c’était maintenant à moi de mettre en pratique toute les merveilles entendues…

Il y a quelques semaines j’ai eu l’occasion de mettre mon savoir en application, et le dénouement de la situation restera pour moi un des plus beaux cadeaux fait par mon fils.
Récompense de tous les efforts que je fais au quotidien pour leur bien-être, et du cœur que je mets à être à leur petits soins.
Parce que ce sont des petits cadeaux de la vie qui méritent d’être partagés tant la satisfaction et l’émotion sont grands.

C’était il y a quelques semaines.
Je suis allée chercher Noam à la maternelle comme tous les jours pour le ramener à la maison.
Il ont une super balançoire dans le jardin, et Noam aime beaucoup se balancer quelques minutes avant de rentrer à la maison. Il se balance fièrement le plus haut possible dans l’attente de mon regard admiratif.
Ce jour-là, il a jeté son sac à dos au sol et a couru comme à son habitude vers les balançoires.
Mais cette fois-ci j’étais arrivée à la dernière minute, la maternelle devait fermer et il n’y avait plus de temps pour des tours de balançoire.
J’ai donc dû l’arrêter dans son élan pour le diriger vers la voiture.
Il est monté dans la voiture en hurlant.
J’avais le cœur qui battait, je sentais la crise arriver et je n’avais pas la force d’y faire face.
Il a fallu batailler pour lui faire mettre sa ceinture qu’il tentait d’enlever afin de me montrer sa frustration; puis il a commencé à marteler le siège avant de coups de pied tout en hurlant de toutes ses forces et en lançant tout ce qui lui passait sous la main sur sa petite sœur.

La crise débutait.

Les nerfs étaient en train de sérieusement me monter.
Je lui en voulais.
Oui, je lui en voulais d’avoir été si contente d’aller le cherche et d’avoir déjà envie de le ramener à la maternelle.
Ça ne faisait que 5 minutes qu’on était ensemble et c’était déjà trop. Le plaisir était en train de se transformer en supplice.
Je crois vous l’avoir déjà dit mais les cris me stressent au plus haut point.

Á ce moment-là j’ai eu envie de tout, sauf de bienveillance.

-J’avais envie de sortir de la voiture en claquant la porte en le laissant démonter la voiture à sa guise.
-J’avais envie de lui hurler de se taire parce que je ne pouvais pas conduire dans ce vacarme, que je perdais patience et que ça allait mal finir. Le fameux  » ça va mal finir », Ça vous parle n’est-ce pas?
-J’avais envie de rentrer en trombe à la maison, d’appuyer sur  »accélérer » jusqu’au lendemain matin, pour déjà le ramener à la maternelle et retrouver mon silence si rassurant.
-J’avais envie de lui hurler que ce n’était pas juste qu’il me fasse une crise alors que je faisais l’effort d’arriver en avance tous les jours pour lui permettre de faire de la balançoire parce que j’avais remarqué qu’il aimait beaucoup ça.

Mais je n’ai rien dit de tout ça.

Les cris s’intensifiaient à l’arrière.
La crise prenait de l’ampleur.
J’avais les mains sur le volant, hésitant à démarrer dans ces conditions.

Oui, j’avoue. Á ce moment là je l’aurais bien laissé sur la bas côté de la route avec une pancarte  »Á louer pour durée indéterminée ».

Puis j’ai pris une longue inspiration, j’ai fermé les yeux quelques seconde, et quand j’eu rassemblé suffisamment de force pour lui faire face avec douceur je lui ai lancé sans grande conviction:

 »Je vois que tu tenais vraiment à faire de la balançoire… »
Lui:  »Ouaaiiiiiiss!!!!! Je voulais faire de la balancoiiiiiiiiiiiiiiiiiiiire!!!! »
Moi essayant de prendre le ton de la mère sure d’elle alors que je n’en menais pas large:
 »Je comprends, elle est vraiment géniale votre balançoire, j’ai remarqué que quand je viens te chercher, tu cours tout de suite en faire… »
Lui:  »Ouiiiii parce que j’en fait jamais, c’est toujours les autres enfants qui prennent la place!  »
Ah, nous y voici. Il venait de pointer le pourquoi de sa frustration et de partager avec moi son sentiment d’injustice face à ses camarades qui monopolisent habituellement cette fameuse balançoire…
Puis recommençant à hurler:  »Je veux la balancoiiiiiiiiree!!!!!!!!!!!!!!! »

Il serre les poings et lève la tête vers le haut pour permettre aux décibels les plus aigües de faire un maximum d’effet.
Je me demande sur quel terrain je me suis engagée, avec cette conversation dont je ne suis pas certaine de maîtriser l’aboutissement.
Moi:  »je comprends que tu sois énervé, c’est vraiment pas juste que tu n’en fasses pas aussi souvent que tu le voudrai… J’ai aussi l’impression que tu es très fatigué, vous avez beaucoup joué aujourd’hui? ».
La sirène reprend de plus belle:  »Naaannnnnn je suis pas fatigué!!! Je veux faire de la balançoire!!!! »

Les coups reprennent, je me dis qu’il va finir par réellement abimer ces foutu sièges.
Je l’observe par le rétroviseur et je reconnais les signes de fatigue. Lorsqu’il se met dans ces états-là, en règle générale c’est parce qu’il est fatigué.
Je lui dis alors tout en tentant de faire abstraction aux coups de pied et à l’impatience qui gronde en moi:
 »Tu sais ce que je te propose? Demain je viendrai 5 minutes en avance comme ça tu pourras t’amuser pendant 5 longues minutes, et maintenant on va rentrer à la maison et  je vais te faire couler un grand bain tout chaud pour que tu puisses te reposer dedans… »

Je me prends à mon propre jeu, et mes phrases prononcées sur un ton patient et doux commencent à m’adoucir et mon impatience commence à s’atténuer.

Lui:  »nan , je veux pas un bain! »
Les coups et les hurlements cessent même s’il prétend que l’idée du bain ne l’enchante pas.
Je comprend que je suis sur la bonne voie.
Moi avec un grand sourire et une mine très enjouée:  »Je pense qu’un long bain te ferait du bain. je vais te mettre beaucoup de mousse, je t’apporterai toutes tes figurines pour que tu puisses jouer  et je te mettrai les berceuses disney que tu aimes. Je suis sûre que tu vas adorer tu verras…

Pas de réponse.
Je me retourne. Á l’arrière de la voiture son visage s’est apaisé.

Il lève les yeux dans ma direction et d’une petite voix il me dit:
 »Je t’aime maman ».

 »je t’aime maman ». La merveilleuse phrase qui enchante toutes les mamans du monde; mais qui dans ce contexte, a une saveur particulière.
Celle de la gratitude.

j’ai senti dans le ton de sa voix de la reconnaissance.
Pendant ces longues secondes de silence, il avait analysé la situation dans sa petite tête de bonhomme de tout juste 5 ans. Et il avait compris.
Oui, il avait tout compris: Son attitude irritable, mon agacement, mon impatience, puis mon écoute, mon oreille bienveillante.
Il avait compris que j’avais pris sur moi, et que plutôt que de rentrer dans son jeu en m’arrêtant à la façade du problème, j’avais pris le temps de creuser.
Que j’avais donné de l’importance à ses sentiments, sa frustration, sa colère; que j’avais réussi à comprendre que c’était essentiellement de la fatigue déguisée, et à lui trouver un réconfort.

En entendant son  »je t’aime » les larmes me sont montées.
Ce fut un moment magique, un de ces petits instants de grâce qui vous font chavirer de bonheur…

J’ai ressenti beaucoup de fierté.
De la fierté pour moi d’avoir réussi à rassembler les forces nécessaires afin d’écouter ses émotions, sans me perdre dans sa crise qui n’était qu’un masque.
Et de la fierté pour lui. Envers ce petit être de 5 ans et son incroyable capacité d’analyse de la situation, d’avoir réussi à passer avec tant de facilité de l’agressivité à la tendresse, et d’avoir osé s’ouvrir par son  »je t’aime » après avoir eu une conduite désagréable.

C’est ce genre de petits moments de la vie qui me montrent à quel point un enfant ressent les choses, à quel point alors même que l’on pense que ce sont des caprices, des crises; ce ne sont en réalité que des appels à l’attention, à l’écoute, Á UN BESOIN DE NOUS.
Á quel point nos réactions face à leur colère peut changer le cours de leur développement.
Á quel point il est entre nos mains de leur donner comme base dans la vie assurance, sécurité, et estime d’eux même ou bien appréhension, hésitation, insécurité.

Nous sommes bien loin de la perfection, mais toute la beauté est dans l’effort à faire de son mieux.

Parce que c’est nous qui construisons ou détruisons les adultes qu’ils deviendront demain.

 

Signé: Une mam sans complexe (ou presque).

  • 23 octobre 2017
  • 23 octobre 2017

    j’adore je me suis reconnue a travers cette chronique. Sauf qu’il m’est arrivée a ne pas être bienveillante – parfois hurler ou donner un fessée… et m’en vouloir a chaude larme tout le restant de la soirée.

    J’essaie de me canaliser et travailler sur moi pour être attentive a mes enfants malgré les nerfs qui peuvent monter parfois. Merci beaucoup pour ton texte qui redonne confiance et courage et qui permet de se sentir moins seule.

    • 23 octobre 2017

      tu travailles sur toi en en cela tu as dit l’essentiel.
      Je pense qu’il est très important de lire sur l’éducation des enfants, beaucoup lire, au bout d’un moment ca fait son chemin naturellement…

  • 23 octobre 2017

    Jaurai jamais pensé qu un enfant puisse répondre de cette manière, qu’il reconnaisse. Surtout bravo à toi d’avoir adopté cette attitude. Ton anecdote m’a fait monté les larmes.

  • 23 octobre 2017

    Tres touchee par cette merveilleuse histoire
    J en ai les larmes ou yeux
    Chaques mots tellement vrai
    Merci d avoir partager avc nous .tu as un enfant merveilleu pour une mere extraordinaire et devouee!!

  • 23 octobre 2017

    Bonjour Sarah

    Oh que j’ai aimé lire ton article. Oh combien je me suis retrouvé dans ce que tu as décrit. Oh combien de parents, de parents entrepreneurs doivent vivre ces moments où l’enfant bloque et bloque sur son blocage !

    J’ai eu des larmes en lisant ce que tu as décrit, avec le je t’aime de ton enfant, et avec toi, qui a réussi à prendre sur toi, pour le bien de vous deux !

    Quel plaisir, et cela montre selon moi que oui, la bienveillance est bonne, et oui, l’écoute, la connaissance de son enfant son nécessaire.

    Quand on rentre du travail et qu’on est épuisé-e par notre journée, et que nos enfants le sont par la leur, être capable de prendre le dessus sur notre colère, et d’aider nos enfants à aller mieux : quel beau geste d’amour !

    Au plaisir
    Evan BOISSONNOT, auteur de https://www.papa-et-patron.fr

  • 24 octobre 2017

    Je me retrouve beaucoup dans ce temoignage… deux garçons de 5 et 2 ans. J’essaie l’education bienveillante, je dis bien que j’essaie car comme tu le décris, par moment j’arrive à me contrôler et par moment je n’y arrive pas du tout. Mes propres sentiments et émotions me dirigent et c’est comme ça aussi que je me dis que pour les enfants c’est piiiiire! Quand j’y arrive, je suis tellement fière et je vois que mon grand surtout est reconnaissant.

  • 24 octobre 2017

    Tu racontes tres bien les histoires Sarah, c très vraie se que tu dis, avec la patiente, un regard bienveillant on peut réussir à faire des miracles !!

  • 24 octobre 2017

    Tellement touchée par ton histoire.
    Tu es une mère incroyable, un bel exemple.
    On vit toutes des crises comme ça. Mais de là à arriver à stopper la montée de nerfs en nous face à leurs cris et leurs pleurs c’est pas évident. Surtout quand notre propre fatigue se rajoute à ça. Bravo.
    Je le sens aussi avec mon fils que je serre fort dans les bras lorsqu’il hurle, parce que j’ai compris récemment qu’il se sentait incompris.

  • 7 novembre 2017

    C’est tellement ça! C’est vraiment difficile parfois de garder son calme mais c’est tellement important. Nos petits anges sont si intelligents et on si besoin de nous. Votre histoire est belle. La récompense de votre patience n’a pas de prix ! Un « je t’aime » de nos enfants vos tout l’or du monde!